samedi 9 novembre 2024

Le rayon de lune

 

La vieille ferme aux volets
Déhanchés.

Croissant de lune dans les volets
Rayon dans la chambre.

L'enfant attend.

 

 
Michèle Magnien
 

2 commentaires:


  1. Sais-tu qui je suis ? Le Rayon de Lune.
    Sais-tu d’où je viens ? Regarde là-haut.
    Ma mère est brillante, et la nuit est brune.
    Je rampe sous l’arbre et glisse sur l’eau ;
    Je m’étends sur l’herbe et cours sur la dune ;
    Je grimpe au mur noir, au tronc du bouleau,
    Comme un maraudeur qui cherche fortune.
    Je n’ai jamais froid ; je n’ai jamais chaud.
    Je suis si petit que je passe
    Où nul autre ne passerait.
    Aux vitres je colle ma face
    Et j’ai surpris plus d’un secret.
    Je me couche de place en place
    Et les bêtes de la forêt,
    Les amoureux au pied distrait,
    Pour mieux s’aimer suivent ma trace.
    Puis, quand je me perds dans l’espace,
    Je laisse au coeur un long regret.

    Rossignol et fauvette
    Pour moi chantent au faîte
    Des ormes ou des pins.
    J’aime à mettre ma tête
    Au terrier des lapins,
    Lors, quittant sa retraite
    Avec des bonds soudains,
    Chacun part et se jette
    A travers les chemins.
    Au fond des creux ravins
    Je réveille les daims
    Et la biche inquiète.
    Elle évente, muette,
    Le chasseur qui la guette
    La mort entre les mains,
    Ou les appels lointains
    Du grand cerf qui s’apprête
    Aux amours clandestins.

    Ma mère soulève
    Les flots écumeux,
    Alors je me lève,
    Et sur chaque grève
    J’agite mes feux.
    Puis j’endors la sève
    Par le bois ombreux ;
    Et ma clarté brève,
    Dans les chemins creux,
    Parfois semble un glaive
    Au passant peureux.
    Je donne le rêve
    Aux esprits joyeux,
    Un instant de trêve
    Aux coeurs malheureux.

    Sais-tu qui je suis ? Le Rayon de Lune.
    Et sais-tu pourquoi je viens de là-haut ?
    Sous les arbres noirs la nuit était brune ;
    Tu pouvais te perdre et glisser dans l’eau,
    Errer par les bois, vaguer sur la dune,
    Te heurter, dans l’ombre, au tronc du bouleau.
    Je veux te montrer la route opportune ;
    Et voilà pourquoi je viens de là-haut.

    La chanson du rayon de lune de Guy de Maupassant

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