lundi 3 août 2015

Présence et résonance (6)

Dans quels pas mettaient-elles ainsi ses propres pas ? Le secret était bien gardé, de Vézelay à Compostelle puis de Compostelle à Pardon, elle marcha. 
Premier jour.
 - Qu’as-tu fait de ton bâton, l’amie, celui que tu as préparé avec tellement de soin ?
- Je l’ai oublié chez les frères, ceux de la Charité de Jérusalem. Je devais dormir chez eux, mais il n’y avait plus de lit. Ils m’ont envoyée chez les Franciscaines après m’avoir offert le dîner. Il y avait un groupe de jeunes, quelques regards, timides sourires, la règle est au silence. Et dire que je m’étais fait du souci pour savoir de quoi nous pourrions parler… tu sais le silence qui s’impose est stérile, les sœurs étaient plus accueillantes. Le bâton est resté là-bas, oublié dans la cour où je l’avais déposé avant de toquer à la porte. Ce matin lorsque je suis passée le récupérer tout était fermé, dans la basilique la messe avait déjà commencé.

Elle a pris son chemin sans plus attendre.
Tant de fatigue et de peur
Elle a posé le sac, elle a pleuré
Les larmes de celle qui va dans un effort tel
Qu'il la dépasse, la pétrit, la presse
Parfois nous sommes balayés par des choses qui nous dépassent.

Elle renonce à rejoindre Corbigny alors qu’elle n’en est plus qu’à trois kilomètres. Trop de côtes ! Où planter la tente dans ce coin de bocage ? Pas une parcelle de terrain n’est accessible.
Soudain tout s’accélère, le coin pour planter la tente, elle le demande à la première personne rencontrée dans le hameau. Et ces inconnus, la reçoivent comme une amie. Marc a tondu un coin du pré pour la tente, Sylvie a offert un rafraîchissement.
Ils veulent savoir, pourquoi ? Ils racontent, deux femmes qui marchaient en plein hiver et qui étaient venues frapper à leur porte dans la nuit froide.
Ils lui proposent le canapé et finalement leur chambre. Elle refuse, elle refuse aussi le partage du repas. Elle n’a pas faim, n’a rien mangé, elle tombe sur le tapis aussitôt la tente montée.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Merci de vos commentaires