Dominique marche avec
moi de Rejtons au petit pont, pour me mettre sur le chemin balisé.
Elle me donne une coquille. Un peu grondeuse, elle me fait remarquer
que c’est ainsi qu’on reconnaît le pèlerin. Je souris, et
remercie. Au moyen âge, avant de s’en retourner, le pèlerin
allait chercher la coquille St Jacques au cap Finistère. Celle-là
attendra au fond du sac.
A Roquefort, je m’arrête chez Mme
Loublié. Bien avant que s’organise l’accueil des pèlerins dans
la région, cette dame offrait le gîte et le couvert, elle garde le
cachet à apposer sur la credencial. C’est la première fois que je
fais un détour, et même un arrêt, pour officialiser ce document
qui ne sera utile qu’en Espagne. Sur le camino, impossible
d’accéder aux gites sans cette preuve tangible du cachet.
Tu
as ouvert la porte, toute petite et menue. Je t’écoutais. Dans le
flot de tes paroles, et tu t’en excusais de parler tant, de me
retenir, et je te rassurais, dans cette vague les souvenirs venaient
se dire, et l’émotion aussi.
Ta mère qui ne savait pas lire :
« Je lui apprenais, elle n’y arrivait pas. Je vois encore les
larmes dans ses yeux ».
Toi petite fille déplacée durant
l’occupation en Auvergne, que vous habitiez à Paris, et qu’il
n’y avait pas grand-chose à manger. Toi, en manque des bras de ta
mère, tu allais le soir sous un grand sapin, et lorsque le vent
chantait dans les branches, tu lui confiais tout ton amour, qu’il
s’envole jusqu’au cœur de la cité.
Je t’ai quittée, il le
fallait bien, te prenant dans mes bras. Je t’ai demandé
l’autorisation de t’embrasser, nous n’étions plus qu’une.
Nous sommes cela, dans cette tension vivante que nous comprenons si
mal, voulant lui faire dire ! Alors qu’elle ne peut pas, elle
agit.
J’ai quitté Roquefort, sans avoir fait les commissions
prévues, il était trop tard.
Je filais bon train, lorsque je
suis tombée sur Alain, il m’a remise sur le bon chemin. Je m’étais
trompée, un peu plus bas, il venait vérifier la signalisation qui
lui paraissait douteuse à cet endroit.
Pour le repas du midi,
j’ai mangé les œufs durs que Dominique avait eu la bonne idée de
me donner.
Arrêt à 16 heures, chez Maggy qui m’attendait,
prévenue par les amis de Rejtons. Elle est veuve, elle vit seule
dans cette maison.
Ce soir donc, tête à tête féminin. Je
les aime, ces rencontres féminines, tout y est simple, connu, et
doux.

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