Chemin de Compostelle - Le 24 Juin 1999

 

Markus est parti. Ce que les yeux peuvent parler et comme il est aisé de faire comme si on ne voyait rien. Que te disaient les miens, jeune ami ?
Maintenant je vais retourner au silence.

A Villacalzar De Sirga, l’église est vraiment très belle, du roman dépouillé. La vierge blanche est bien là, adossée à sa colonne. Elle fait vraiment des miracles pour les pèlerins, j’ai vu les yeux de Dandy l’incrédule, se remplir de lumière. Il s’est assis près de moi, plein de douceur.
Je suis arrivée assez tôt, à Carrien De Los Condé, et maintenant la chaleur écrase la ville où plus rien ne bouge. Ce n’est plus le chemin qui fait chape, mais la chaleur qui tombe du ciel.
Au refuge cela s’agite sur les lits et dans les couloirs. Tous mes muscles, mes tendons, mes nerfs sont tendus à l’extrême, le moment des crampes n’est pas loin. A l’intérieur ce n’est plus que champs électriques en survoltage, impossible de me détendre.
Des nuages noirs s’amoncellent, il pourrait bien y avoir de l’orage. J’ai partagé mon repas avec Leïla que je rencontre ce soir pour la première fois.
Demain la journée commence par 17 km sans village, sans eau. C’est dire que le refuge est un lieu buttoir et qu’il va y avoir du monde, des tensions et des ronflements.

Ici les hommes regardent les femmes, ne pas le faire serait sûrement leur faire offense.