Elle
aimait à marcher dans la ville, prendre le dernier train pour
rentrer.
Elle
quittait le lycée à pieds, ayant dépensé dans les cafés l’argent
qui lui avait été donné pour payer le bus.
Après
le parc, elle remontait en direction de la cathédrale, passait près
de la prison, ce grand mur de pierres hérissé de tessons de
bouteilles.
Puis
elle redescendait dans les vieux quartiers…
C’est
là qu’elle se perdait dans les ruelles, dans la nuit souvent
brumeuse. Seule, croisant quelques inconnus, elle aimait cette
ambiance, en toute confiance.
Des
images accompagnaient ces longues traversées solitaires, des images
qu’elles gardaient en esprit, plus tard, elle écrirait sur
son cahier, comme le peintre en quelques traits dessine une chambre
perdue au fond d’une impasse.
Puis,
il fallait s’extraire de cette obscurité trouée de la pâle
clarté des réverbères. Ne pas manquer le dernier train.
Lorsqu’elle
atteignait la gare trop de lumière projetée sur la façade blanche,
elle clignait des yeux. Ça faisait mal, comme le retour vers cette
pseudo réalité, le train qui avalerait les kilomètres, le vélo
qu’il faudrait pousser dans la côte, et la maison.
Ils
seraient tous à table, on la questionnerait, elle se taisant les
poings serrés sous la table…