Mettre
la charrue avant les bœufs, cela se fait dans l'ignorance de ce qui
se passe en l'autre, de là où il en est, de son chemin qui n'est
pas que de cette vie, les apparences sont si trompeuses !
Ainsi,
elle n'avait pas besoin de lui, sa vie elle l'avait assumée seule,
seule avec les enfants, seule avec l'homme déserteur, mort au bout
de cet abandon, seule avec la mort pour compagne, seule elle avait
marcher dans le froid, dans la pluie, dans la souffrance de la
brûlure, seule elle avait atteint le bout du bout en un rendez-vous
de l'au-delà.
Alors vraiment le besoin de lui, n'était pas de ce
niveau, et c'est bien parce que lui ne cessait de se dérober, de
disparaître, de s'isoler dans son antre, c'était bien en réponse
qu'elle se manifestait, que se faisait l'attente, le vent gémissant
autour de la tour carrée, être là, qu'il le sache, trouver la
juste distance qui n'étouffe pas, mais aussi n'abandonne pas. Voilà
ce qu'elle faisait qui n'est pas « avoir besoin de. » au
sens le plus réducteur de l'expression.
Sa
joie lorsqu'il était là, peu importe l'endroit, dans la cour, sous
le chêne, au bord de la rivière, sa joie, elle, n'avait aucune
limite, intact et neuve à chaque fois. Elle est de tous les temps en même temps.
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