La
prairie un écosystème parmi tant d’autres…
Extraits
de Biomimétisme Janine M. Benyus.
Ainsi,
la question des engrais occulte celle de l’érosion des sols causée
par l’agriculture de labour de plantes annuelles. Les pesticides
masquent en outre un deuxième problème : celui de la fragilité
intrinsèque de monocultures génétiquement identiques. L’argent
emprunté pour payer les intrants de type combustibles fossiles
(dérivé du pétrole) en dissimule un troisième : le fait que
l’agriculture industrielle ne détruit pas seulement les sols et
l’eau, mais étrangle également les communautés rurales.
Même
si nous ne voulons pas l’admettre, nos exploitations sont devenues
des usines détenues par des grands propriétaires qui, avec notre
complicité dilapident le capital écologique que la prairie a mis
cinq mille ans à constituer. Chaque
jour, notre sol, nos cultures et nos populations deviennent un peu
plus vulnérables.
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Dans
une série d’ouvrages tels que New Roots for Agriculture, Meeting
the Expectations of the Land of Altars
of Unhewn
Stone, Wes Jackson explique que le
problème
de l’agriculture est un problème ancien et général, né de notre
insistance à nous dégager de la nature, du remplacement des
systèmes naturels par des systèmes totalement étrangers et de la
guerre que nous faisons aux processus naturels, au lieu d’en faire
nos alliés.
Il en a résulté une perte régulière de capital écologique, due à
l’érosion et à la salinisation des sols ainsi qu’à la
domestication et à l’affaiblissement progressifs de nos
cultures. Pour retrouver notre chemin, nous devons, selon Jackson,
nous souvenir de ce à quoi ressemblaient les ancêtres de "nos"
cultures dans leur propre élément.
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« En
substance, nous devons cultiver la terre comme la nature le fait »
Trublion des temps modernes, Wes Jackson, un agriculteur du Kansas de
la quatrième génération, né en 1936, est arrivé à cette
conclusion toute simple il y a des années, avant d’avoir les mots
pour le dire. C’était son seizième anniversaire, il prenait au
lasso et montait le bétail du ranch de son cousin dans le Dakota du
sud, loin de l’exploitation familiale située dans le Kansas. Il
fut stupéfait de constater que, bien que personne ne cultivât ni ne
s’occupât de cette terre, l’herbe y poussait année après
année, sécheresse ou pas, sous la neige ou sous un soleil de plomb.
Des serpents à sonnettes s’y lovaient où bon leur semblait, et
des chevêches des terriers montaient la garde devant leur terrier.
« Il y avait une justesse dans tout cela », dit-il
aujourd’hui.
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Sur
le bord de la route, un panneau indique The Wauhob : une prairie
qui a miraculeusement échappé au labour, probablement parce qu’elle
était en pente, et qu’il était difficile d’y faire venir des
charrues. Je ralentis, puis arrête complètement de rouler, bouche
bée devant ce spectacle d’autant plus remarquable qu’il fait
suite à des hectares d’une régularité implacable. D’où je
suis, j’aperçois à la fois les champs de blé et la prairie, et
j’ai l’impression d’être devant une parabole visuelle, celle
de Jacob et d’Esaü, issus du même moule mais de caractères très
différent. D’un côté, une volonté imposée, de l’autre, la
volonté de la terre.
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Piper
parle des plantes comme il parlerait de ses voisines au sein d’une
communauté, tandis qu’il me présente les espèces fixatrices
d’azote, celles dont les racines s’enfoncent dans le sol pour y
puiser l’eau, celles qui, au printemps, se dépêchent de pousser
pour faire de l’ombre aux mauvaises herbes, celles qui résistent
aux ravageurs, ou abritent ces héros que sont les insectes utiles.
Il me signale également les papillons et les abeilles,
pollinisateurs aux langues agiles qui répandent des rumeurs d’une
plante à une autre.
Sous
cette foule incontrôlée se cache 70%du poids vif de la prairie, un
épais tissu de racines, de radicelles et de stolons qui captent
l’eau et pompent les nutriments des profondeurs.
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Le
secret de la prairie réside dans sa capacité à maintenir les deux
assemblages –en surface, et sous la surface de la terre- dans un
état de stabilité dynamique.