Le
jour de tes 30 ans, nous avions réservé une table dans un
restaurant dans le sud, au bord de l’océan.
Nous
sommes arrivés un peu tôt, alors, aller sur la côte rocheuse, à
cet endroit «Le souffleur». Là,
les vagues puissantes s’engouffrent sous les roches noires et
rejaillissent dans une cavité. C'est magique ce jet blanc sur noir !
Ce
23 Mars 2003, l’océan ourlait de belles déferlantes.
Il
fallait traverser une ravine pour aller au plus près du spectacle.
Pas
envie, suis restée là, vous regardant partir ta sœur et toi,
écoutant la fureur des flots.
Tu
t’approchais du bord, seul par devant, et avant même qu’elle se
lève, j’ai su la vague, plus forte, plus cinglante, tu t’approchais
encore, ignorant le danger.
Il
fut un temps, où hystérique je serais devenue devant l’évidence
qui se disait là, j’aurai hurlé, j'aurai fait de grands gestes désarticulés en
ta direction, te sommant de retourner en lieu sûr, implorant le
ciel, la terre, refusant de tout mon être, repoussant la vague loin de toi. Quand
vous étiez petits, je le disais, pour vous je soulèverai les
montagnes, et cela est vrai.
Un
grand silence… la vague et toi, l’un vers l’autre, irrémédiablement.
Une
immobilité en mon cerveau, cela ne pense plus, cela sait.
Te
sentir, prendre conscience ; Voir te mettre à courir, la vague à tes
trousses. Elle te rattrape, explosion sur les roches, ne plus te
voir.
Alors
en moi, en ce silence : « Si je le vois se relever… »
Tu
t’es relevé.
Nous
nous sommes retrouvés, la paix ne m’avait pas quittée. Tu as
raconté, te mettre à plat ventre, le déferlement de l’eau
partout autour de toi, même pas mouillé.
Le
restaurateur avait vu la scène de sa terrasse, il t’a dit le
danger, il t’a dit la chance, il t’a dit les accidents mortels en
cet endroit.
Frédéric L.