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samedi 11 janvier 2025

Traversée de Mafate

 

Le fils a traversé le cirque de Mafate, sac au dos.
Il est parti, malgré les interdits, les pluies avaient raviné les versants, et risquaient encore de s’abattre en de violents orages.
Tu as dit à ton retour, lorsque je te faisais remarquer qu’on ne défie pas sans risque la nature, qu’à chaque passage difficile tu avais demandé l’autorisation à ces forces que tu perçois si bien.
Ainsi tout est à sa juste place, tu vas vers ton autonomie.
 
Il a ramené quelques belles photos, paysages de brumes, de cascades en gorges effilées, clarté limpide du petit matin où ombre et lumière s’opposent pour le plus beau mariage.
Aussi, instantanés de cette fraternité qui rapproche les hommes, tu n’es pas un solitaire, tu aimes dans cette simplicité. Alors photos de rougail, de feu de bois, de rencontres… les oiseaux, les vaches libres de cet espace clos, les plantes…
Il a ramené aussi quelques désillusions, le silence envahi par le bruit des hélicoptères, les mafatais devenus exploiteurs de touristes.
Ainsi les derniers jours, vous n’aviez plus qu’une somme modique, et plus rien à manger, à la table d’hôte vous avez demandé s’il était possible de vous préparer quelque chose à manger pour ce montant là. Hé bien, non, cela ne le fut pas, menu fixe, prix fixe, la dame ne dérogea pas de sa logique financière et vous laissa partir ventre vide, à chacun son destin !
Pourtant dans la descente du col du Taïbit, un homme dans sa guitoune vous offrit le thé, et l’abri alors que la pluie avait pénétré jusqu’aux os, là où il fait froid du dehors et du dedans.
 
Les lieux clos, ne sont pas propices au développement de l’humanité, mais ils ne sont perdition que pour les hommes qui ignorent que tout est lié.
La nature ne sait pas se fermer sur elle-même, elle ne produit pas d’image de soi, rien que de l’échange, et en son sein, le sauvage, libre de tout attache.
 
La plus belle rencontre que tu me racontas, celle de cet homme solitaire, caché derrière les songes…prudent l’animal, curieux aussi.
Direct tu l’interpellas en créole, que faisait-il là ?
Il pêchait l’anguille, et il partagea un peu de son mystère, celui-là vit en dehors des villages, ermite dans un monde si vaste.