lundi 10 août 2015

Présence et résonance (20)

Plusieurs jours de résistances en lâcher-prises, de l'un à l'autre comme une balle rebondissante. Il lui arrive d'entendre un rire au loin. Elle ne peut pas cette rencontre directe, pas encore, le petit singe est bien vigoureux à secouer les barreaux de sa cage. La résistance c'est cassant, le rire entrant en résonance ferait voler en éclats cette structure qui est sa prison mais aussi sa maison. La maison qui est corps, de chair, de sang, celle dont le vivant ne peut se passer, pas encore. Elle en est donc aux leçons et sur le chemin les conséquences ne tardent pas, aussi rapide et efficace que le boomerang.
Neuvy Saint Sépulcre, Mouhers, elle a décidé de passer par Saint-Plantaire à cause de ses voûtes plantaires.
Chaleur et sac trop lourd, elle peine. A Cluis elle a fait le plein de commissions, la peur de manquer demain est un lundi. Elle s’arrête pour casser une petite croûte, ce sera toujours ça en moins à porter. Et puis elle va avec son gros sac, sous un soleil éclatant, échauffer ses pieds en direction du camping de St Plantaire. Et de se dire qu’on ne la reprendra plus à cet excès de zèle, et de se dire qu'elle n'a rien compris, rien appris alors qu’il y a une semaine elle avait partagé le repas avec Monique et Daniel et que ce sac était si léger, et de se dire que la confiance ça ne s’apprend pas, elle est où elle n'est pas, qu’en vérité le bon et le mauvais lui tombent dessus, juste ne pas résister.
A Orsennes, l’église était ouverte, si fraîche. L’abondance de possibilités pour s’asseoir lui a donné des regrets de devoir continuer la route.
Pauvre enfant, pauvre cervelle égarée ! Des regrets pour ces bancs !
Parfaitement ! Comment je fais, moi, avec ce sac que je dois poser pour pouvoir le remettre, et comment je fais, quand il n’y a que le sol si bas ? Je suis fatiguée.
Si tu es fatiguée, arrête-toi.
J’en ai marre de tes leçons ! La fatigue, c’est plus fort que ça, la fatigue c’est justement ne plus savoir quoi faire. C’est comme la misère, ça fait oublier d’aimer. Ça tu ne peux le comprendre que si tu vas dans le pétrin, jusqu’au bout de tes forces, là où il n’y a plus que toi en face de toi.
Et la voilà repartie, avec son gros sac sur le dos et ses pieds…

Arrivée à St Plantaire, elle fait une pose dans un abri bus, pour le siège et l’ombre. Intuition qu’il n’y a pas de camping en cette ville. A un carrefour un hôtel, elle demande pour le camping. Encore 5 km ! Impossible, elle ne peut plus. « C’est combien pour la nuit ? »
C’est pas cher, à coté de l’église où elle a commandé son miracle, elle ouvre l’enveloppe "Mamy-Papy". L’église est fermée. Elle prend un apéritif à la terrasse où discutent des habitués. Elle les interroge sur ce St Plantaire. On lui dit qu’il s’agit de Pantaléon, le sujet n’intéresse pas, elle laisse tomber. Les conversations repartent bon train…
Bercée par les mots, les voix, des vibrations, les pensées s'absentent, celles qui se présentent ne s'arrêtent pas, elles passent, passent, il est l’heure d’aller se glisser dans un lit douillet.

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