La
petite route monte et descend dans un joli cadre de verdure, mais
elle n'est pas au paysage. Les kilomètres défilent à son pas lent
sans aucun village où se ravitailler, elle n’a rien mangé si ce
n’est la soupe du soir. « Marcher certes, mais pas le ventre vide ! »
Le bébé brailleur s’est réveillé, il réclame son lait, son
sein, il ne veut pas de cette incarnation qui fait le manque, il ne
veut pas de cette naissance dans l’inconnu.
Chatenet
en Dogon a été accueillante : boulangerie, mais aussi supérette,
boucherie, église ouverte. Restaurée, elle se dit que ce n’était
pas raisonnable. Vrai ce n'est pas raisonnable de toucher ainsi les
peurs les plus enfouies, primales, le premier cri. C'est vrai
que la raison avec ces explications canalisent les émotions, on
parle alors de maîtrise, mais ce n'est pas cela qu'il l'a mise en
chemin, autre chose qui se manifeste et disparaît.
L’après
midi touche à sa fin. Où dormir ? Tout est privé, privé de
liberté en cette contrée, pas un endroit qui ne soit clôturé de
barbelés. Il reste bien quelques bois mais ils sont accrochés à
des pentes raides. La nature encagée, un vrai camp de concentration
avec ses pics hérissés, la main de l’homme partout écrasant le
sauvage en une domestication servile. Pour finir c’est lui qui se
retrouve en cage...
Elle
décide de rejoindre St Léonard de Noblat. Arrivée en ville elle se
renseigne pour un camping. La jeune fille, qui la reçoit au syndicat
d’initiative, lui donne les indications, elle ne sait pas s'il est
ouvert en cette saison : « Mais installez-vous ! ».
Les
eaux noires, rapides, prêtes à sortir du lit, les eaux de la Vienne
bordent le camping. Il est fermé, sans hésiter elle monte la tente.
Les eaux noires sont si proches... enfant elle a failli se noyer, ce
jour-là elle avait cru savoir nager, s’en était vantée, oh pas
tant que ça, juste un niveau d’assurance qui se dit et le fond
qui se dérobe au moment de reprendre pieds, boire la tasse, la
panique, se débattre. On ne lutte pas contre les eaux sans se
mettre en grand danger, c'est comme aller en des certitudes.
"comme aller en des certitudes"...
RépondreSupprimerJ'aime bien tes pages, tu as toujours des moments où le récit nous invite à réfléchir autrement.
Merci, Miche.
Passe une douce journée.
Merci à toi Quichottine
RépondreSupprimerIci, il fait nuit maintenant...
Amicales pensées